Affiné à un point d’équilibre presque vertigineux, l’art de Judy Niemack s’impose aujourd’hui plus que jamais, à force de contrôle et de ductilité, comme un métal de plus en plus pur. Avec cet album en forme de menu-dégustation de grand restaurant sans esbrouffe, c’est une vaste carte des nuances de bleu qu’elle déplie, de structures aussi classiques que celle de All Blues (ou d’un Misterioso qu’elle transforme en A Crazy Song To Sing) à la couleur allusive du Blue de Joni Mitchell en passant par les irrésistibles hétérodoxes Moanin’ (à la frontière toujours entre profane et paroxysme churchy), ou Afro-Blue. Véritable leçon de jazz singing (comme les oeuvres de ses meilleures aînées et consoeurs), ces soixante-quinze minutes déjouent tous les pièges où l’on a vu tomber depuis des années d’innombrables innocentes (et souvent éphémères) vocalistes en mal de starisation, ne serait-ce que celui du scat, qui devrait être réservé aux seul(e)s musicien(ne)s. Judy Niemack (ainsi qu’elle nous en avait fait la démonstration jadis sur les scènes du festival de Calvi, notamment en duo avec son amie Anne Ducros) cultive cette discipline avec autant d’élégance que de parcimonie. Mesure, discipline, hypersensibilité (qualités qu’on retrouve au niveau des arrangements-écrins de Jeanfrançois Prins): comme une idée de perfection. Philippe Carles – Jazz Magazine
- Parution : 10/04/2007
- Label : BluJazz