Fran Detela définit la syntropie comme ceci « une entropie négative qui représente en même temps la capacité de la nature à s’auto-organiser spontanément et sans dommages pour l’environnement à un degré de plus en plus élevé d’organisation interne et de complexité ».
Un groupe organique, de la musique pure, instinctive et réactive, voilà ce que j’avais en tête avant de mettre sur pied ce nouveau quartet. Contrairement à mon habitude, je ne voulais pas d’arrangements préétablis, mais des thèmes et structures simples, afin de laisser les quatre éléments de ce groupe interagir en toute liberté.
J’ai eu un jour une vision dans laquelle j’étais l’air, Nicola l’eau, Nicolas la terre et Dré le feu.
L’histoire même de cet enregistrement est étonnante. Cela s’est passé un dimanche. Le rendez-vous fut fixé à 10h au studio Jet, à Bruxelles. L’installation fut à l’opposé des tendances actuelles : nous nous sommes placés d’une manière fort proche, sans séparations, et surtout sans casques audio, forçant l’écoute attentive acoustique et la concentration.
Nous avons fait un réglage du son assez rapide afin de vite commencer à enregistrer les premières prises.
Les pizzas furent vite commandées et avalées à l’aise. Nous avons pris le temps de parler de choses et d’autres avant de reprendre.
Toutes les plages se retrouvant sur cet album ont été enregistrées entre 14h30 et 17h, heure à laquelle nous avons arrêté la session, bien que le studio fût réservé jusque 19h.
Nous n’avons pas eu recours à des montages, et les erreurs ont été gardées telles quelles (écouter les baguettes de Dré tomber sur le sol pendant les échanges entre le groupe et la batterie sur Blizz !).
La première plage : Fly, Fly, Rockets, a trouvée son inspiration dans les morceaux be-bop up-tempo de l’époque, mais avec certains twists harmoniques. Suit alors une reprise d’une des plus belles ballades populaires : You Are So Beautiful de Billie Preston, rendue célèbre par le chanteur britannique Joe Cocker. Blizz ensuite est un morceau « medium swing », également empreint d’une modulation harmonique particulière, bien que la forme ne fasse que huit mesures. Vient alors Ipseity, s’ouvrant par une introduction impressionniste de Nicola Andrioli. La rythmique entame ensuite un solide tempo lent afin d’accueillir la flûte traversière. On émerge du rêve avec l’énergique Too Cool For School : sorte de boogaloo à la Scofield/Eddie Harris. Norma est un hommage à la shaman Norma Panduro Navarro, connue pour ses chants icaros dictés par l’ayahuasca (la liane amazonienne utilisée pour altérer la conscience lors de cérémonies). Stéphane s’est amusé à utiliser deux de ces chants et de les harmoniser afin de préserver l’unité de Syntropy. L’album finit enfin sur Major Changes. Ce titre a une double signification : il fait à la fois référence aux changements drastiques qui s’opèrent dans une vie, et aussi aux multiples accords majeurs autour desquels la composition s’est construite.
Voici donc un jazz moderne et ancien à la fois, un retour à la simplicité et honnêteté de ce que cette musique est censée représenter : une entité sincère générée par quatre individus à la fois séparés mais unis, emprunts d’une liberté communicative.
- Parution : 15/11/2023
- Enregistré : 20-03-2022
- Référence : SBR003
- Support : numérique
- Label : Step By Records
- Studio : Jet Studio
